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Chine et Russie : intérêts communs et distincts

Georges Ibrahim Tounkara
10 mars 2023

Pékin s’est rapproché ces dernières années de Moscou pour contrer la puissance américaine. Cependant, les deux partenaires ont encore des intérêts distincts.

Vladmir Poutine et Xi Jinping à Pékin en février 2022
Vladmir Poutine et Xi Jinping à Pékin en février 2022Image : Alexei Druzhinin/AP/picture alliance

Aors que se poursuit la guerre en Ukraine, les pays occidentaux, Etats-Unis en tête, multiplient les mises en garde à la Chine soupçonnée de vouloir fournir des armes à la Russie, ce que dément Pékin.

La Chine ne veut rien se faire dicter et se montre même menaçante. Le chef de l'Etat chinois, Xi Jinping, a dénoncé, en marge du Congrès national du peuple, les Etats-Unis comme voulant opprimer son pays.

Il parle d'"encerclement" et exhorte la direction du Parti communiste à faire face à des défis sans précédent.

Pour son  ministre des Affaires étrangères, Qin Gang, la Chine est libre de s’allier avec qui elle veut y compris la Russie.

"Certains pays qui ont tendance à considérer les relations Chine-Russie sous l'angle des alliances de la guerre froide ne voient souvent que leur propre image. La relation Chine-Russie est fondée sur la non-alliance et la non-confrontation, elle ne vise aucune tierce partie. Elle ne constitue une menace pour aucun pays et ne fait l'objet d'aucune ingérence ou discorde de la part d'une tierce partie", dit Qin Gang.

Xi Jinping et Joe Biden au sommet du G20 en Indonésie en novembre 2022 Image : Kevin Lamarque/REUTERS

Rejet de l'ordre mondial actuel

Vladimir Poutine et Xi Jinping sont à peu près du même âge, 70 et 69 ans respectivement. Ils se sont rencontrés près de 40 fois au cours des dix dernières années. 

Leur style de direction est dictatorial. Ils répètent sans cesse l'"amitié" entre les deux puissances nucléaires, le "partenariat stratégique".

Les deux chefs d’Etat ne font pas mystère de leur rejet de l'ordre mondial actuel et de leur volonté de briser la prétendue suprématie de l'Occident.

Vladmir Poutine et Xi Jinping à Pékin à Shanghai, en septembre 2022Image : Sergei Bobylyov/Sputnik/AFP

Deux pays différents

Et pourtant, il existe de grandes différences entre les deux pays. La Chine est, si l'on se base sur le produit intérieur brut, la plus grande économie du monde après les Etats-Unis. L'économie russe est environ dix fois plus faible.

Moscou vit depuis des décennies de l'exportation de matières premières. Jusqu'à présent, la modernisation du pays a échoué. En attaquant l'Ukraine, Vladimir Poutine s'est manifestement trompé : politiquement, militairement et économiquement.

L'unité de l'Occident, sa capacité à réduire en très peu de temps sa dépendance au gaz, au pétrole ou au charbon russes, obligent le Kremlin à orienter son économie vers les pays asiatiques, et surtout vers la Chine.

Il en va tout autrement de la Chine qui profite de Moscou, par exemple, en obtenant du pétrole et du gaz russes à des conditions spéciales.

Certes, la Chine hausse souvent le ton envers les Etats-Unis. Mais Pékin a toujours la possibilité de s'entendre avec Washington sur un compromis et ne devrait pas être intéressé par une guerre commerciale avec les Etats-Unis et les Européens.

Aujourd'hui, les dirigeants de Pékin affirment que la Russie est le "partenaire stratégique le plus important" de la Chine. Mais selon des analystes, la Chine ne pourrait être poussée de manière offensive aux côtés de la Russie que si les Etats-Unis soutenaient militairement une déclaration d'indépendance de Taiwan.


 

Georges Ibrahim Tounkara Journaliste au programme francophone de la Deutsche Welle