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EconomieBénin

Le Bénin touché après l'annonce de Tinubu sur l'essence

2 juin 2023

A peine investi, le nouveau président nigérian s'est empressé d'annoncer la fin des subventions sur l'essence, provoquant la colère de ces concitoyens mais aussi des Béninois.

Stand de vente d'essence illégale
La grande majorité des véhicules béninois sont alimentés par de l'essence illégale Image : Dan Kitwood/Getty Images

Du simple au triple ! Depuis le début de la semaine, le prix de l'essence au Nigeria a flambé, provoquant la colère des consommateurs et de longues files d'attente devant les stations-services. En cause : l'annonce du tout nouveau président, Bola Tinubu.

A peine investi, ce dernier s'est en effet emparé de l'une de ses promesses de campagne : pour réduire le gouffre financier créé depuis trois décennies par les subventions sur le carburant, il veut supprimer ces dernières à la fin du mois.

Le kpayo plus cher que la pompe

Une mesure extrêmement impopulaire et qui a déjà aussi des répercussions au Bénin, voisin du Nigeria. Là-bas, ce n'est pas le prix à la pompe qui a augmenté mais celui du "kpayo" comme on appelle l'essence de contrebande, en provenance du Nigeria.

"Le prix sur le marché dépasse déjà le prix de l'essence à la pompe. Donc vous en avez jusqu'à 700-800 francs CFA alors que l'essence est à 650 francs à la pompe"

Ernest Gbaguidi est le président de Bénin Santé, une association de défense des consommateurs. Depuis l'annonce du président Tinubu et l'augmentation des prix du carburant au Nigeria, il est inquiet.

Le secteur de la contrebande fragilisé 

"Le prix sur le marché dépasse déjà le prix à la pompe" (E. Gbaguidi)

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Car cette augmentation se répercute sur le commerce illicite : la hausse des prix chez l'un des premiers producteur de pétrole du continent touche aussi le secteur de la contrebande et le marché noir sur lequel s'alimentent les revendeurs béninois.

Et au bout de la chaine, il y a le consommateur - sachant que la quasi-totalité de la demande nationale est actuellement couverte par l'essence frelatée.

"C'est une situation très préoccupante" poursuit Ernest Gbaguidi. "Si le Nigeria ne revoit pas sa politique, les consommateurs n'auront pas d'autre choix que de se rabattre sur les stations-services au Bénin. Maintenant ce sont ceux qui vivent dans les coins où il n'y a pas encore assez de stations-services qui vont véritablement en souffrir."

Pour les consommateurs qui ont la possibilité de prendre de l'essence à la pompe, le choix est - pour le moment - vite fait : non seulement c'est moins cher mais c'est aussi réputé de meilleure qualité, moins dangereux, moins polluant.

Mécontentement côté vendeurs 

Dès lors, on comprends que l'arrivée au pouvoir de Bola Tinubu mécontente les vendeurs de "kpayo". "Tous les vendeurs béninois sont mécontents et ils regrettent que les Nigérians l'aient choisi !"explique Henri Assogba, leur porte-parole. "Nous on n'a pas de problème avec notre gouvernement ! Depuis l'arrivée du président Patrice Talon, on n'a jamais constaté de lutte contre les vendeurs d'essence comme les gouvernements précédents l'ont fait. Bon, on ne peut rien attendre des autorités parce que nous exerçons une activité illicite ! Nous prions Dieu pour que nos autorités créent des emplois pour que beaucoup de gens trouvent un autre travail."

Une occasion à saisir ? 

Pour les autorités béninoises, qui tentent depuis longtemps d'enrayer le phénomène de la contrebande, la hausse des prix pourrait donc être aussi une opportunité, explique Jeannine Ella Abatan, chercheuse à l'Institut d'études de sécurité, ISS"Cette opportunité ne pourra être servie que si les stations-services sont en mesure de répondre à la demande et que les autorités béninoises arrivent à trouver des alternatives sérieuses pour assurer la demande sur l'ensemble du territoire béninois, mais également à offrir des alternatives pour les acteurs qui vivent de cette contrebande."

Les prochaines semaines diront quels scénarios peuvent être envisagés tant au Bénin qu'au Nigeria ... Jusqu'ici, les précédentes tentatives d'Abuja de supprimer les subventions se sont heurtées à une telle colère de la part de la population qu'elles ont dû, finalement, être abandonnées.

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